30 juil. 2011

Puisque l’humanitaire est un combat…

L’humanitaire, bien sûr, est un combat: contre la mort, la souffrance, la misère, la corruption, etc., mais aussi et surtout contre la bêtise, l’orgueil, le cynisme et toutes les désillusions qui ne manquent jamais d’émailler le parcours.

Jean-Baptiste, un de mes neveux avec qui j’ai beaucoup d’affinités, me demandait récemment «-As-tu jamais utilisé ton judo dans tes missions humanitaires?». La question pourrait paraître incongrue, mais elle ne l’était pas de sa part puisqu’il savait que j’avais régulièrement été confronté à des situations "assez chaudes" lors de mes missions.  Ma première réponse fut «-non». Non, parce que je n’ai jamais utilisé mes techniques de judo dans mon travail. Certes ce n’est pas l’envie qui m’aura manqué parfois de faire un bel ude-hishigi-ude-gatame (armblock) à l’homme corrompu qui tend le bras pour ce mettre l’argent de l’aide dans la poche, ou effectuer un petit shime-waza (étranglement) à ce politicien dont le discours pousse à toujours plus de haine et de violence, ou encore de mettre à terre celui qui accourt sur la misère du monde pour se faire un nom. Mais ça ne se passe pas comme ça dans la vraie vie…

27 juil. 2011

Dégoûts et des couleurs…

Un jour, on m’informa que le corps d’une femme avait été découvert un peu à l’extérieur du camp [Site 2]. Comme à chaque fois dans ces cas là, je prévins mon collègue onusien responsable de la sécurité du jour, ainsi que le commandant militaire thaïlandais du camp que je sortais pour aller investiguer. Puis je pris avec moi une poignée de policiers khmers et nous partîmes. Après avoir franchi les barbelés de la limite du camp, nous nous enfonçâmes dans l’espèce de steppe aride qui entourait le camp [1]. Nous avions pour guide le témoin qui avait découvert le corps le matin-même ; nous arrivâmes donc assez rapidement sur les lieux. Là gisait le corps d’une jeune femme d’une trentaine d’années, assis, encore en appui sur un gros tronc d’arbre, les yeux vitreux, le regard fixe et la peau de cire. La jeune femme était vraisemblablement morte le matin même puisque le corps était déjà bien rigide mais ne sentait pas encore. Un des hommes qui nous accompagnaient connaissait vaguement la défunte : elle était mère de six enfants et était en pleine dépression ces derniers temps. Elle s’était suicidée en avalant une grosse quantité d’insecticide.