20 juil. 2014

La sécurité dans les camps de réfugiés [suite]

On m’appelle sur le canal radio d’urgence ; la voix cassée de mon camarade onusien, et les cris que j’entends par derrière, ne me disent rien qui vaille. Il s’agit d’un meurtre sur la voie publique, sur l’axe principal du camp de Sanro. J’arrive sur les lieux dans les secondes qui suivent. Mon collègue, un thaïlandais très expérimenté, me briefe: la femme couchée sous nos yeux sur la piste vient d’être éventrée au couteau de cuisine. Mon camarade tâche de garder tant bien que mal son sang-froid professionnel, mais ses yeux mouillés trahissent une grande émotion. Il faut dire  que la situation est particulièrement émouvante. Ce n’est pas tant le corps gisant de cette pauvre femme, dans la trentaine, et les marques visibles des coups de couteau dans l’abdomen, ni la foule silencieuse qui s’agglutine autour de la scène; ce sont les cris déchirants de cette jeune fille, effondrée devant la dépouille. Mon collègue me traduit ce qu’elle crie au ciel : « - Maman… non… Maman, que vais-je devenir sans toi !... »