31 janv. 2011

Vivre sous les tropiques: "les petites bestioles" (première partie)

Qui dit vivre sous les tropiques, dit aussi bien sûr cohabiter avec une faune très large de petites bestioles, gentilles et moins gentilles, qui viennent agrémenter notre train-train quotidien d'émotions sans égal. Les anecdotes concernant cette cohabitation sont innombrables, en voici juste quelques unes:   

[Bangkok, Thaïlande] [NB. En Asie du Sud-est on se déchausse toujours avant d'entrer dans une maison. On laisse alors les chaussures devant l'entrée]. Un jour, chez nous à Bangkok, alors que je mettais mes chaussures, je sentis que quelque chose empêchait mon pied de pénétrer jusqu’au fond de la chaussure, comme parfois ces papiers d'emballage qui restent coincés après l’achat.

29 janv. 2011

Un crime au plus que parfait.

Un jour un crime particulièrement spectaculaire eut lieu dans la partie sud de Site 2: un homme décapité en plein jour au beau milieu de la foule. Pourtant lors de notre enquête, il nous fut impossible de trouver le  moindre témoin qui puisse identifier le coupable. J’en fis part à un ami, le Père Venet, un vieux prêtre missionnaire français qui avait fait tout son sacerdoce dans la campagne profonde du Cambodge et qui, par la relation étroite qu’il entretenait avec ses ouailles réfugiées, savait tout ce qu’il se passait dans le camp. Il était connu pour son franc-parler, très cru, tant en Khmer qu’en français.
Il m’écouta, puis avec un sourire quelque peu sarcastique, me répondit : « ben, couillon, ton coupable tu ne le trouveras jamais ; le type qui a été trucidé là, tu sais qui c’était ? C’était un sorcier qui jetait des mauvais sorts et que tout le monde craignait dans le camp. Les gens ici sont très reconnaissants à celui qui l’a éliminé. Les témoins ne parleront jamais. Oublie cette histoire ! ».

En effet, nous ne pûmes jamais élucider cette affaire.

Période UNBRO, 1987-1992, Site 2. 

20 janv. 2011

Mea Culpa du Bloggeur

Je me rends compte en relisant mes textes ci-dessous que, sans le vouloir, je contribue à renforcer des clichés sur l’humanitaire : tous mes récits sont véridiques, mais ils ne relatent le plus souvent que des événements, somme toute, "exceptionnels", remplis d’une intensité qui n’est pas forcement l’intensité du vécu humanitaire  quotidien.  C’est normal, c’est quand même en partie  par ce besoin d‘exorciser ces instants que j’ai créé ce blog. Mais ne décrire que ces moments exceptionnels c’est courir le risque de faire croire au lecteur non averti que l’humanitaire ce n’est que cela. En vérité, le quotidien humanitaire, comme tout quotidien, connait  lui aussi sa routine ; cette même routine que j’avais tenté de fuir en France, et qui avait été un élément déterminant de ma décision de m’expatrier ! Certes la routine humanitaire se développe dans un contexte totalement différent, avec des activités qui peuvent, depuis l’Occident, sembler hors du commun, mais elle n’en reste pas moins une routine. Alors, parlons aussi de la routine !

7 janv. 2011

Le masque de Zorro.

C’est comme ça; il est des événements qui marquent plus que d'autres, et celui-ci en fait partie: c’était dans le camp de réfugiés de Site 2,  j’étais alors avec mon collègue thaïlandais Songcharoen sous le petit préau de bambou qui servait à la fois de salle de réunion et de salle à manger au bureau des Nations Unies du camp, et nous nous apprêtions a prendre un petit déjeuner. A peine étions nous assis que le sifflement strident et bien reconnaissable d’une roquette qui nous arrive dessus à toute allure se fit entendre. Nous eûmes à peine le temps de nous jeter à terre, que l’engin explosait dans un vacarme épouvantable, déchiquetant autour de nous les branches des arbres.  Puis... une seconde d'un silence mortel, durant lequel les feuilles hachées par les éclats retombèrent  doucement sur nos têtes, et le cri de notre collègue Andy hurlant à plein poumon «That’s a 4 ! that’s a 4 ! Situation 4 !».