30 déc. 2014

Attention : il y a expat et «expat».

Un jour que je marchais dans les rues de Bangkok et descendais une passerelle, une jeune femme blonde, dans la trentaine, avec à ses côtés un adorable petit garçon tout aussi blond qu’elle, m'aborda toute alarmée: «-Excuse-me, can you help me, please? » Je reconnus tout de suite un fort accent français.
«-Vous êtes française ? »
«-Oui. »
«-Qu’est-ce qui vous arrive?».

Elle me raconta: touriste, on venait de lui voler tous ses papiers, ainsi que son porte-monnaie et ses billets d’avion, et elle n’avait même plus de quoi retourner en France. Elle me demanda alors si je pouvais juste l’aider un peu afin qu’elle puisse réunir la somme nécessaire à l’achat de ses  billets. M’enquérant d’abord de savoir si elle avait déjà signalé sa situation au consulat de France, elle me répondit par l’affirmative, et qu'un passeport de secours était en cours de fabrication, mais que c’était tout ce que le consulat pouvait faire pour elle; ce qui ne me surprit pas outre mesure.
Rassuré sur ce point et comme je n’avais que peu de liquide sur moi, je l’invitai à me suivre vers le prochain distributeur de billet où je retirai le maximum autorisé en un jour. Je lui remis la somme, non sans avant avoir noté ses coordonnées (nom, adresse postale, numéro de téléphone, adresse courriel). Puis, comme il était près de midi, j’invitai mon infortunée compatriote et son petit garçon dans un bon restaurant du coin, afin qu’ils se remettent l'un et l'autre de leurs émotions.
La conversation fut agréable; la jeune femme me parla d’elle, de sa vie en région parisienne, de son métier; elle me fit part de son intérêt pour l’humanitaire, pour la vie spirituelle, etc. Elle é
tait assez BCBG, manifestement de bonne éducation et de bonne famille. Le petit garçon, quant à lui, écoutait la conversation tout en jouant avec ses couverts. C’est dans la bonne humeur que je les accompagnai alors après le déjeuner au World Trade Center (celui-là même qui, quelques années plus tard, sera entièrement détruit par les rixes) où je réglai les quelques achats qu’ils firent pour préparer leur voyage. La femme s’absenta un instant pour emmener le petit aux toilettes. Ils n’en revinrent jamais. 

J’eus beau attendre un bon moment, ils avaient tous les deux bel et bien disparu. Je rentrai donc à la maison, un peu circonspect. Comme j’avais confié à la jeune femme ma carte de visite sur laquelle figuraient toutes mes coordonnées, j’attendais un coup de fil. Rien. J’envoyai alors un email à l‘adresse qu’elle m’avait laissée; le mail me revint avec un message d’erreur indiquant que cette adresse courriel n’existait pas. Je ne reçus jamais aucun courriel en sa provenance. Dans les jours qui suivirent, je lui envoyai une lettre, dans laquelle je m’enquérais tout simplement de savoir ce qu’il était advenu d’eux, mais je ne reçus jamais aucune réponse.
Je dus bien me rendre à l’évidence : cette gentille jeune femme BCBG, bien élevée, n’était autre qu’un vulgaire escroc, instrumentalisant son jeune fils pour rendre la supercherie plus crédible encore.
Je m’étais fait avoir comme un bleu!
Je n’ai jamais osé avouer à mon épouse que dans cette histoire j’avais perdu la moitié de mon salaire de l'époque.
 
Quelques semaines plus tard, sur une autre avenue de Bangkok, un français, dans la cinquantaine, vint à moi et me joua exactement la même scène. Je ne pus m’empêcher de l’envoyer promener, bien que poliment, lui faisant part de ma mésaventure précédente; il disparut aussitôt sans demander son reste.
Le consulat de France et des amis me confirmèrent plus tard qu’il y avait bien en ville des français, très « convenables » en apparence, qui avaient pour métier d’arnaquer ainsi leurs compatriotes. Lamentable.
Avis. 

Période: post-EU Laos

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